Anxiété, télétravail, blessures : quand les ostéopathes réparent les conséquences physiques du confinement

Anxiété, télétravail, blessures : quand les ostéopathes réparent les conséquences physiques du confinement

Les ostéopathes, qui ont repris le travail, soignent les maux dûs au confinement. / © S.Manceau/MAXPPP
Les ostéopathes, qui ont repris le travail, soignent les maux dûs au confinement. / © S.Manceau/MAXPPP

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Mal de dos, cervicales douloureuses, muscles contractés par le stress : les deux mois et demi de confinement ont eu des conséquences sur nos corps. Et dès la levée des restrictions sur les consultations médicales, les ostéopathes ont vu leurs carnets de rendez-vous se remplir.

Par Romane IdresPublié le 23/05/2020 à 17:47 Mis à jour le 23/05/2020 à 18:41L’humain n’est pas fait pour rester statique et enfermé, c’est une certitude. Aujourd’hui, avec le confort que peuvent offrir les intérieurs de maison, on pourrait croire que d’y passer quelques semaines n’a rien d’insurmontable. Mais ce n’est pas tout à fait juste. « Les changements d’habitude ont des répercussions sur le corps« , explique Cynthia Dérian, ostéopthe à Beauvais. Depuis deux semaines, elle a repris les consultations dans son cabinet et à domicile et constate les conséquences du confinement sur ses patients. Le télétravail en premier lieu. « Certains prennent encore moins de pauses en télétravail que lorsqu’ils sont au bureau, et ce n’est pas bon de rester sans bouger pendant plusieurs heures. Il faut se lever et marcher régulièrement pour améliorer la circulation sanguine, relâcher les muscles, remettre un peu de souplesse dans le corps. »

Des activités de confinement pas toujours idéales 

Ce constat, Thomas Desobry, ostéopathe à Amiens, l’a fait aussi. Depuis la réouverture de son cabinet, il a vu beaucoup de patients avec des douleurs aux cervicales et dans les épaules à cause de leur posture devant leur ordinateur. « Ce n’est pas évident de leur trouver la posture optimale, parce qu’ils n’ont pas forcément ce qu’il faut à la maison« , admet-il. « Je leur dis de réhausser l’ordinateur, de trouver des points d’appuis en posant les coudes sur la table et les pieds au sol. Mais parfois, il faudrait carrément changer de fauteuil. Et souvent, ils travaillent sur un ordinateur portable, ce qui est beaucoup moins bien qu’un équipement fixe. » 

« Il y a aussi ceux qui ont fait plus de bricolage et de jardin, ou ceux qui ont fait du sport non accompagné et qui se sont blessés« , ajoute Matthew Vercoutere, ostéopathe à Tergnier et à Laon. « Ou tout simplement, ceux qui sont restés à la maison, à s’occuper en lisant ou en regardant des écrans. Quand l’oeil est concentré sur quelque chose pendant longtemps, on adopte souvent une posture qui n’est pas idéale. » 

Toutes sortes de douleurs et de blessures donc, qui ne sont pas exceptionnelles mais pas anodines non plus. À noter tout de même que certaines professions ont été plus impactées que d’autres. Les enseignants par exemple n’ont pas l’habitude de travailler assis devant un ordinateur toute la journée. Et bien sûr, les personnels soignants. Avant la réouverture de son cabinet, Matthew a travaillé bénévolement avec les personnels des hôpitaux de Chauny et de Laon. « C’est déjà une profession qui consulte beaucoup en temps normal. La posture debout, les gestes répétitifs… Ça s’est accentué avec l’épidémie, sans compter qu’ils devaient se déshabiller et se rhabiller sans cesse« , explique le praticien. « Et puis le stress, bien sûr, ça contracte les muscles. »

Le stress abîme le corps

Car le stress a en effet un impact direct sur le corps. Pour Cynthia Dérian, l’état psychologique général est à prendre en compte pour comprendre l’apparition de ces douleurs. « Certains ont très mal vécu le confinement, l’isolement, surtout ceux qui étaient déjà un peu anxieux de nature vis-à-vis des maladies« , explique-t-elle. C’est le cas de Mireille Defer, fonctionnaire, qui n’a pas travaillé pendant toute la période de confinement. « J’ai déjà des soucis d’anxiété, et avec le stress du virus, et la peur pour mes proches, ça a pris de l’ampleur« , confie-t-elle. « J’avais la nuque bloquée, tout était tendu, et je ne dormais pas bien. J’ai discuté avec mon ostéopathe, il a travaillé sur mes cervicales et tout s’est dénoué« , ajoute Mireille, à la fois ravie et soulagée.

À l’inverse, le confinement a eu des effet bénéfiques sur certaines personnes, qui ont pu prendre du temps pour eux ou se reposer un peu plus. « Quand le psychisme va bien, le corps se relâche. Et quand ça ne va pas, il se contracte« , insiste Cynthia Véran. Ce que confirme sa patiente Caroline Bertrand, qui est revenu la voir dés la réouverture du cabinet après un faux mouvement lors d’une séance de sport. Pourtant infirmière de métier, elle a mieux vécu le rythme du confinement que celui qu’elle a en temps normal. « Je suis en service de pédiatrie, alors c’était difficile mais quand même beaucoup moins que dans les unités des adultes« , explique-t-elle. « Mais là pendant deux mois, mon mari qui était en télétravail gardait nos deux enfants à la maison, je n’ai pas eu à faire les allers-retours entre le travail, l’école et la maison. C’est beaucoup moins de stress et ça m’a fait du bien« , se réjouit-elle. 

Plus étonnant encore, les changements de régime alimentaire ont pu jouer le rôle de facteur aggravant. « Les organes sont très liés aux côtes, la posture va jouer sur les organes, et inversement. Ces dernières semaines, on a peut-être mangé un peu plus, un peu plus gras et sucré, avec plus de produits laitiers. Ca se répercute sur le corps« , poursuit-elle.

Certains patients encore réticents

Si l’on trouve de tout dans la patientèle des ostéopathes, certains praticiens ont remarqué que tout le monde n’avait pas encore encore retrouvé le chemin du cabinet. « Les personnes âgées ne sont pas encore revenues« , d’après Thomas Desobry, dont une partie de la patientèle habite en milieu rural. « Je n’ai pas de certitude à ce sujet, mais je pense que c’est parce qu’ils sont encore un peu inquiets de faire des consultations médicales pour le moment. » Cynthia Dérian quant à elle note que si les nourrissons ont repris les consultations, elle ne s’est pas encore occupé d’enfants depuis la reprise. « Déjà, les blocages se font moins facilement à leur âge, mais je pense aussi que les parents évitent de prendre des risques en les amenant au cabinet si ça n’a rien d’urgent. Et bien sûr, ils n’ont pas été à l’école depuis longtemps, alors ils ont sûrement moins de petits bobos. »

Pourquoi les kinés ne connaissent pas le même boom de consultations ?

Les kinés ne semblent pas autant pris d’assaut que les ostéopathes, ce qui peut s’expliquer par diverses raisons. Déjà, comme le souligne Thomas Desobry, « pendant deux mois et demi, il n’y a eu aucune opération non-urgente, donc très peu de rééducation à faire chez le kiné« . D’après d’autres professionnels, c’est aussi parce que les ostéopathes se consulte plutôt en première intention, alors que l’on se fait prescrire les séances de kinésithérapie par son médecin traitant. Or, beaucoup ne sont pas encore retourné chez leur médecin traitant. Et pour ceux qui s’y rendent tout de même, ils se heurte à une attente plus longue pour obtenir un rendez-vous. « Beaucoup de kinés ont l’habitude de recevoir deux ou trois patients en même temps, et là, avec les restrictions sanitaires, ils ne peuvent plus que les prendre un par un, et avec le temps de désinfection des équipements, il y a moins de temps pour les consultations et les créneaux se remplissent vite« , explique Matthew Vercoutere. Enfin, il faut noter que les kinésithérapeutes continuaient de travailler pendant le confinement, pour assurer la continuité des soins des patients pour qui c’était vital. 

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